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Le Portugal fait son marché parmi les retraités suisses

Le pays lusitanien espère devenir la Floride de l’Europe grâce à son kit de statuts fiscaux destiné aux pensionnaires et aux investisseurs.

Le Portugal lorgne toujours plus sur les retraités. Mardi soir, une délégation d’avocats fiscalistes lusitaniens, accompagnée du consul portugais à Genève, est venue présenter au bout du lac les avantages fiscaux à s’installer ou à investir dans ce pays qui, depuis quatre ans, s’est lancé dans une grande campagne de séduction destinée aux étrangers. Quelque 40 personnes – Portugais installés en Suisse de longue date, entrepreneurs du cru ou genevois fortunés – ont fait le déplacement au Swissôtel Métropole pour parler fiscalité dans le pays aux «3300 heures de soleil par an».

«Dans la vie, il n’y a que la mort et les impôts qui sont inévitables, plaisante Jaime Esteves, associé à PwC Portugal, qui effectue régulièrement ce type de tournées en France ou aux Etats-Unis. Mais notre gouvernement a bien travaillé pour rendre le pays plus attractif fiscalement.»

Statuts de résidents non habituels, visas express pour les investisseurs, assurance vie, exonération des droits de succession: le Portugal espère convaincre les retraités, les travailleurs à haute valeur ajoutée et les multinationales de s’installer au Portugal grâce à son kit de statuts fiscaux spéciaux qui doit convertir le pays en «Californie de l’Europe».

Résidents à mi-temps exonérés d’impôts

Depuis 2013, par exemple, Lisbonne exonère d’impôts pendant dix ans les retraités européens qui souhaiteraient acheter un bien immobilier dans le pays. A condition d’y vivre au moins 183 jours par an. Ce statut de «résident non habituel» est devenu un nouvel outil de promotion économique du pays. Quelque 5700 Helvètes – principalement des banquiers privés et des familles – et Français se seraient déjà laissés séduire par ce régime fiscal, selon Jaime Esteves.

Pour Miguel Calheiros de Velozo, Consul du Portugal à Genève, ces discussions sont le reflet d’une économie qui s’ouvre au monde. «Du nord au sud, on croise énormément d’étrangers dans le pays. C’est un pays où il fait bon vivre mais aussi faire des affaires.» Le consulat recevrait jusqu’à huit appels par semaine relatifs au statut de résident non habituel.

Lisbonne, nouvelle porte de l’Europe

Mais le Portugal espère également séduire les investisseurs extra-européens grâce à ses «visas dorés». Un sésame, octroyé en moins de 90 jours, ouvrant les portes de l’espace Schengen à tous les entrepreneurs prêts à investir au moins 500 000 euros pour l’achat d’une maison ou d’un appartement, injecter un million d’euros dans l’économie portugaise ou encore créer dix emplois. Le visa doré permet également de briguer la nationalité portugaise 6 ans après s’être installé dans le pays.

Plus de 3295 «visas dorés» ont été octroyés depuis fin 2012. Le statut a rapporté quelque 2 milliards d’euros en investissement – la majorité en immobilier –, selon les chiffres communiqués par le ministère lusitanien des Affaires étrangères. Près de 80% des visas dorés ont été octroyés à des ressortissants chinois. Suivent les millionnaires Brésiliens et Russes avec 151 et 111 permis.

Une «planque» contre des pots-de-vin

Or ces statuts sont contestés depuis la découverte qu’un citoyen chinois recherché par Interpol a pu obtenir un passeport portugais en échange d’une somme de plus d’un demi-million d’euros. L’affaire ne s’arrête pas là. En tout, dix-sept personnes, dont l’ancien ministre portugais de l’Intérieur Miguel Macedo et plusieurs hommes d’affaires chinois, sont actuellement jugées pour corruption, blanchiment d’argent ou trafic d’influence.

Un temps gelé par l’ancien gouvernement portugais de centre droit, l’octroi de «visas dorés» a repris «au même rythme qu’en 2014», a rassuré fin avril le ministre socialiste des Affaires étrangères Augusto Santos Silva tout en affirmant avoir mis en place de nouvelles mesures de contrôle depuis son entrée en poste le 26 novembre dernier.

Marchandage dans une Europe en crise

Le Portugal n’est pas le seul pays méditerranéen à avoir mis en place un tel système. L’Espagne et la Grèce, affaiblis par la crise économique, tentent également d’attirer les investisseurs étrangers grâce à leurs visas Schengen. Sans pour autant pouvoir promettre la même stabilité fiscale et politique que le Portugal, estime Jaime Esteves. «Depuis la crise de la dette des Etats, il y a peu de pays qui peuvent se vanter d’offrir de telles conditions-cadres garanties pendant dix ans, estime-t-il. En fiscalité, c’est une éternité.»

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